07-10-2022 · Vision

La crise énergétique va accélérer les investissements en faveur de l’énergie intelligente

Les marchés de l’énergie actuels sont polluants, inefficaces, volatils et vulnérables. La nécessité d’une transition énergétique est plus évidente que jamais et l’électrification des applications finales sera la locomotive de cette transition. Il faudra investir des sommes élevées, mais les réalités actuelles (forte volatilité, rupture d’approvisionnement, nécessité d’une production nationale à la fois propre et peu énergivore) viennent peu à peu à bout des résistances.

    Auteurs

  • Sanaa Hakim MBA - Co-Portfolio Manager Robeco Smart Energy

    Sanaa Hakim MBA

    Co-Portfolio Manager Robeco Smart Energy

Les marchés de l’énergie : en transition, mais loin d’être durables

L’énergie est essentielle à la croissance économique, mais les combustibles fossiles occupent une place écrasante. Le pétrole, le charbon et le gaz représentent plus de 80 % de l’énergie primaire nécessaire pour alimenter les économies du monde entier. La signature de l’Accord de Paris et la transition vers une économie à zéro émission nette indiquent que le passage à des sources d’énergie renouvelable et à faible émission de carbone s’accélérera au cours des 10 prochaines années et que les combustibles fossiles finiront par être supplantés. Pourtant, malgré cette accélération, les choses n’avancent pas assez vite.

Nous savons depuis toujours que le secteur de l’énergie, qui représente 80 % des émissions totales de CO2, est très polluant. Mais les crises simultanées qui ont éclaté récemment ont mis en évidence d’autres dangers de ce secteur. Il est extrêmement inefficace : 60 % des combustibles fossiles extraits sont gaspillés, une moitié étant perdue dans la production d’électricité, et l’autre en raison de l’inefficacité de leur combustion. Il est très vulnérable parce qu’il dépend dangereusement de pays riches en combustibles fossiles, mais dont la diplomatie et la gouvernance laissent à désirer. Et il est volatil : le conflit en Ukraine a pris les marchés de l’énergie au dépourvu et a accentué l’envolée des prix.

Pour pouvoir limiter le réchauffement climatique extrême, près de 75 % de la production mondiale d’électricité devra provenir de sources à faibles émissions d’ici 2030

L’électrification de la consommation est indispensable à l’énergie propre

La décarbonation pourra se faire à la seule condition que la combustion d’hydrocarbures dans les moteurs et les chaudières soit remplacé par le déplacement d’électrons dans un circuit. Mais cette réalité de demain ne dépend pas uniquement de la production d’énergie propre au moyen de sources d’énergie renouvelable. Il faut aussi que la consommation en aval devienne « propre » grâce à l’adoption d’applications finales fonctionnant à l’électricité (voir la figure 1).

Pour pouvoir limiter le réchauffement climatique extrême, près de 75 % de la production mondiale d’électricité devra provenir de sources à faibles émissions d’ici 2030. Actuellement, l’énergie éolienne et solaire ne représente que 6 % du mix mondial. Pour atteindre l’objectif zéro émission nette, il faudra multiplier par deux ou trois la consommation d’électricité au cours des prochaines décennies. Cette évolution se fera grâce au secteur des transports (batteries lithium-ion, groupes motopropulseurs, hydrogène vert et transport ferroviaire de passagers), mais aussi grâce au secteur de la construction (pompes à chaleur électriques, chauffage, ventilation et climatisation, isolation) et de l’industrie (électrification des processus de production).

Figure 1 | Des solutions synchronisées : l’offre d’énergie renouvelable augmente à l’appui de la consommation d’électricité.

Figure 1 | Des solutions synchronisées : l’offre d’énergie renouvelable augmente à l’appui de la consommation d’électricité.

L’approvisionnement en énergie renouvelable augmentera afin de faciliter l’électrification des applications finales.
Source : BP outlook

Piloter la transition énergétique sans la faire sortir des rails

Entre-temps, la sécurité énergétique a pris la place de la sécurité climatique en tête des priorités, particulièrement en Europe. Avec l’aggravation des tensions liées à la guerre en Ukraine, la Russie a cessé d’approvisionner en gaz l’UE, qui a donc désespérément besoin d’énergie pour garder ses lumières allumées, ses citoyens au chaud et ses économies en mouvement.

Contraint de trouver une solution à court terme, les pays se tournent vers les combustibles fossiles, mais à mesure que les tensions géopolitiques s’exacerbent, la crise met en lumière l’ampleur des risques auxquels s’expose une économie dépendance des combustibles fossiles. Consciente de cet état de fait, l’Union européenne a pris rapidement des mesures pour accélérer davantage encore la mise en œuvre de son programme de décarbonation. Son plan « REPowerEU » vise à réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre, à accélérer l’électrification des bâtiments et des industries et à accroître les investissements dans les sources d’énergie renouvelables et les infrastructures permettant de relier entre eux les pays du bloc.

Mais il est difficile de trouver un compromis entre sécurité énergétique et sécurité climatique en raison de l’insuffisance des capacités technologiques actuelles, mais aussi du manque de volonté politique et de l’opinion publique défavorable, surtout si les consommateurs sont contraints de se rationner.

Faits que vous ne saviez pas sur la transition énergétique

Libérer le pouvoir de Smart Energy !

En savoir plus

L’envolée des prix de l’énergie pousse à l’action

D’après l’Agence internationale de l’énergie, pour atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici 2050, le volume des investissements devra doubler pour s’élever à 5 000 milliards USD par an. Dans un grand nombre de modèles économiques, les coûts énergétiques représentent une part importante des dépenses totales. Les économies d’énergie réalisées par une entreprise ont donc souvent un effet considérable sur son résultat net.

À long terme, les avantages de la transition ne cesseront d’augmenter, mais à court terme, de nombreuses entreprises devront faire face à des dépenses élevées, notamment dans les secteurs difficiles à électrifier. Cela étant, les coûts de production des énergies renouvelables sont en baisse par rapport aux coûts de production des énergie traditionnelles (voir la figure 2). Et maintenant que le prix des énergies traditionnelles explose, et donc que les délais d’amortissement des investissements visant à s’approvisionner en énergies renouvelables et à améliorer l’efficacité énergétique se raccourcissent, les consommateurs et les secteurs énergivores vont accélérer leur transition énergétique.

Figure 2 | Énergies renouvelables : des coûts compétitifs dans l’industrie et l’immobilier résidentiel

Figure 2 | Énergies renouvelables : des coûts compétitifs dans l’industrie et l’immobilier résidentiel

Le coût harmonisé de l’énergie provenant de sources renouvelables (installations solaires, géothermiques et éoliennes) est compétitif par rapport à celui des formes d’énergie conventionnelles telles que le gaz, le charbon et le nucléaire, voire bien inférieur dans le secteur de l’industrie.
Source : Lazard