26-04-2022 · Recherche

Des rendements sans risque plus élevés ne se traduisent pas par une meilleure performance globale des actions

Nos recherches montrent que les primes de risque sur actions sont généralement plus élevées quand les rendements sans risque sont faibles, et vice versa. Ces conclusions réfutent l’hypothèse selon laquelle des rendements sans risque plus élevés sont synonymes d’une meilleure performance globale moyenne des actions.

Télécharger la publication

    Auteurs

  • David Blitz - Chief Researcher

    David Blitz

    Chief Researcher

La performance attendue d’une action se compose du rendement sans risque et de la prime de risque sur ce titre. L’élément sans risque est généralement considéré comme le rendement des bons du Trésor à court terme ou des obligations d’État à plus long terme, en fonction de l’horizon d’investissement de l’investisseur. Quant à la prime de risque sur actions, elle peut être interprétée comme la récompense que les investisseurs peuvent s’attendre à obtenir pour avoir assumer le risque lié à la détention d’actions. Toutes choses égales par ailleurs, un rendement sans risque plus élevé devrait donc se traduire par une meilleure performance globale attendue de l’action.

Cette notion a été contestée dans plusieurs documents de recherche1 au fil des ans. Mais ces analyses se fondent sur une période d’observation relativement courte ou bien n’incluent pas les 20 dernières années, qui ont connu des taux d’intérêt exceptionnellement bas. Dans notre étude2, en revanche, nous réexaminons la relation empirique entre performance boursière et rendement sans risque en analysant les données de 1866 à 2021 pour les marchés américains, et de 1870 à 2021 pour les marchés internationaux.

Dans notre analyse, nous comparons la performance globale des actions du marché américain selon différents environnements de taux d’intérêt. Si les actions offrent une prime de risque relativement stable, nous devrions observer un volume similaire de prime de risque pour tous les niveaux de rendement sans risque et une meilleure performance globale des actions en cas de rendement sans risque plus élevés. Cependant, nos résultats brossent un tableau différent : la performance globale des actions est à peu près la même pour tous les niveaux de rendement sans risque, comme le montre le graphique 1. Ces résultats montrent également que les primes de risque sur actions et les rendements sans risque sont inversement corrélés.

Graphique 1 | Performance des actions en fonction des niveaux de rendement sans risque, de janvier 1866 à juin 2021

Graphique 1 | Performance des actions en fonction des niveaux de rendement sans risque, de janvier 1866 à juin 2021

Source : Robeco Quantitative Research

Pour examiner plus en détail cette corrélation, nous avons fait une régression de la performance mensuelle des actions moins les rendements sans risque par rapport au rendement sans risque et au rendement réel des actions de la période. Tout d’abord, nous avons constaté que le coefficient estimé pour le rendement sans risque s’est avéré fortement négatif. Ce résultat invalide l’hypothèse selon laquelle la prime de risque sur actions est indépendante du niveau du rendement sans risque. Au contraire, il accrédite davantage l’autre hypothèse, selon laquelle la performance globale attendue des actions est à peu près la même en période de rendements sans risque faibles ou élevés. Qui plus est, la performance des actions et les rendements sans risque pourraient être inversement corrélés.

Deuxièmement, nous avons constaté que le coefficient estimé pour le rendement réel des actions était sensiblement positif. Dans leur globalité, les résultats de cette régression impliquent que la prime de risque sur actions augmente avec le rendement réel des actions, mais diminue avec le rendement sans risque. Ces conclusions corroborent celles d’une autre étude3 qui établit que la différence entre les rendements des actions et ceux des obligations permet de prévoir les rendements futurs des actions.

Restez informé sur l'investissement quantitatif

Receive our Robeco newsletter and be the first one to get the latest insights, or build the greenest portfolio.

Restez connectés

Les estimations de la prime de risque sur actions aboutissent à des conclusions similaires

Nous avons également étudié les estimations implicites de la prime de risque sur actions basées sur notre analyse de régression et calculé la performance globale des actions qui y correspondait en ajoutant les rendements sans risque de la période. Tout d’abord, nous avons analysé les résultats obtenus d’une analyse de régression dont la seule variable était les rendements sans risque. Comme le montre le graphique 2, nous avons constaté que les niveaux prévisionnels de performance globale des actions étaient plus stables que ceux des primes de risque sur actions.

Graphique 2 | Performance ajustée des actions sur la base d’une analyse de régression ayant pour seule variable les rendements sans risque, février 1881 à juin 2021

Graphique 2 | Performance ajustée des actions sur la base d’une analyse de régression ayant pour seule variable les rendements sans risque, février 1881 à juin 2021

Source : Robeco Quantitative Research

Au cours de la période étudiée, la performance globale prévisionnelle des actions a généralement oscillé entre 8 % et 11 %. L’écart le plus notable se situe à la fin des années 1970 et au début des années 1980, lorsque les taux d’intérêt étaient très élevés, ce qui s’est traduit par une baisse des rendements attendus. La performance globale attendue était encore positive, mais après avoir pris en compte les rendements sans risque élevés, les primes de risque prévisionnelles sur actions étaient extrêmement négatives durant cette phase.

Deuxièmement, nous avons effectué une analyse similaire sur la base des résultats obtenus d’une analyse de régression dont les variables étaient les rendements sans risque et les rendements réels des actions. Dans ce cas, la performance globale prévisionnelle des actions s’est caractérisée par une variation temporelle beaucoup plus forte, comme l’illustre le graphique 3.

Graphique 3 | Performance ajustée des actions sur la base d’une analyse de régression ayant pour variables les rendements sans risque et les rendements réels des actions, février 1881 à juin 2021

Graphique 3 | Performance ajustée des actions sur la base d’une analyse de régression ayant pour variables les rendements sans risque et les rendements réels des actions, février 1881 à juin 2021

Source : Robeco Quantitative Research

Cela dit, les niveaux prévisionnels de performance globale des actions sont restés plus stables que ceux des primes de risque sur actions. De plus, la performance globale prévisionnelle des actions n’était pas moins élevée pendant les périodes de faibles rendements sans risque, comme les années 1940 et 2010, que pendant les phases de rendements sans risque élevés, comme les années 1970 et 1980. Par conséquent, les primes de risque sur actions prévisionnelles étaient généralement plus élevées quand les rendements sans risque étaient faibles.

Les marchés internationaux confirment ces résultats

Pour donner plus de fiabilité à nos conclusions, nous avons effectué les mêmes analyses en utilisant des données provenant de marchés internationaux. Nous avons trouvé des résultats très similaires, puisque le coefficient estimé pour le rendement sans risque était négatif pour chacun des 16 pays de l’échantillon. Ces conclusions corroborent le fait que la performance globale attendue des actions est constante et que la prime de risque sur actions est inversement corrélée au rendement sans risque.

Ce qui revient à dire, une fois de plus, que les primes de risque sur actions sont élevées quand les rendements sans risque sont faibles et qu’elles sont faibles quand les rendements sans risque sont élevés, toutes choses égales par ailleurs.

Conclusion

En résumé, nos conclusions nous amènent à écarter complètement l’hypothèse selon laquelle un rendement sans risque plus élevé se traduit par une performance globale attendue des actions plus élevée. Au contraire, la performance globale attendue des actions ne semble pas être liée (ou pourrait même être inversement liée) aux niveaux de rendement sans risque, ce qui signifie que la prime de risque sur actions est beaucoup plus élevée quand le rendement sans risque est faible que quand il est élevé.

Bien que nos observations ne puissent pas déboucher sur une règle tactique et rentable d’allocation d’actifs qui pourrait être appliquée en temps réel, nous pensons qu’elles remettent en question les idées reçues sur la performance boursière attendue. Par conséquent, nos conclusions devraient être prises en compte dans les décisions stratégiques d’allocation d’actifs, en particulier lorsque le rendement sans risque est très élevé ou très faible par rapport à sa moyenne historique.

Télécharger la publication